Faisant siennes les directives de son modèle, le couturier Cristobal Balenciaga
"Architecte de la ligne, peintre coloriste, musicien pour l’harmonie et philosophe pour la mesure "Jean Pierre Delifer fut un artisan exigeant.
Ses modèles auront fait de lui bien plus qu’un costumier, un artiste à part entière dont les silhouettes éblouirent les spectateurs de Paris à Hollywood, du Caire à Beyrouth.
Cadet d’une famille de six enfants, Jean Pierre Delifer développe ses talents dès l’enfance. Il commente les jupes des dames rendant visite à sa mère, coupe, modèle, tissu, rien ne lui échappe, alors qu’il n’a pas plus de six ans.
Il sollicite plus tard de sa sœur aînée Lily une recommandation de sa part pour la couturière: "chez Edith", une grande maison de prêt-à-porter où elle a ses habitudes. L’apprenti vibre pour la couture et ne tarde pas à créer sa propre maison.
Rencontrant un vif succès, son exigence ne cesse pourtant de croître.
Au théâtre, il habille les pièces pour le Festival International de Baalbek: c’est ainsi que l’institution le met en contact avec la chanteuse libanaise Feyrouz. Il la suivra au cours de nombreuses tournées, lui dessinant de somptueux costumes.
La guerre civile libanaise le pousse à s’exiler trois ans en Egypte puis à Paris où il habille une richissime clientèle. Il présente en décembre 1984 sa collection haute couture "Les Orientales ", à l’Hôtel Intercontinental à Paris.
Sa notoriété le conduit à se faire une place dans le monde du cinéma, où il coopère notamment avec le réalisateur Youssef Chahine qui lui commande les costumes du film "Adieu Bonaparte " et qui l’introduit à la Comédie Française. Il adopte le vocabulaire de la prestigieuse institution qu’il appellera simplement sa maison.
Il habille les acteurs de "Caligula", la pièce d'Albert Camus, dans une mise en scène du cinéaste égyptien.
Préparant une œuvre portant sur le Christ, le réalisateur Martin Scorsese qu’il a connu à Milan par le biais d’un ami commun, interroge Delifer sur la façon dont il vêtirait le Christ. «Nu» lui répondra spontanément l’artiste.
Les deux hommes partagent la même vision et le réalisateur invite son interlocuteur à lui envoyer quelques croquis à Hollywood.
C'est ainsi que le cinéaste le choisira parmi les trois autres stylistes en lice, un avion sera mis à sa disposition, et un crédit lui sera ouvert.
«La dernière tentation du Christ» sera tournée au Maroc. Le costumier y achètera une énorme quantité de toile de jute qu’il ensevelira dans la boue pour lui donner la couleur et la saleté de l’époque où se situe le film.
Car Delifer était pointilleux, attentif à toute vraisemblance: ainsi l’affiche du film " Au nom de la rose", inspirée du roman médiéval d’Umberto Eco, avec Sean Connery dans le rôle principal, présentait une doublure du col du capucin exécutée sur une machine à coudre, un anachronisme fatal, rédhibitoire, aux yeux de Jean Pierre Delifer.
Lorsqu’il revient au Liban en 1994, le styliste est auréolé d’une gloire internationale, cependant il conserve une simplicité désarmante.
Une exposition, organisée par son ami Jean Louis Mainguy au Festival International de Baalbek, a lieu après le décès de l’artiste.
Sa mémoire nous est transmise comme celle de l’instigateur, sur nos scènes et au-delà de notre folklore, d’un art nouveau et particulier.
Il rayonne hors des frontières libanaises où il porte encore son songe oriental sur de nombreuses scènes dans un souci d’authenticité, d’élégance, de pureté des lignes et de noblesse du matériau:
Tel est son héritage....
Toute l’équipe du blog de Sérop navigateur souhaite de Bonnes et Heureuses Fêtes de Pâques à tous ses fidèles lecteurs.
In memoriam de notre grand Jean Pierre, voici quelques souvenirs (voir photos en fin d’article) qui nous sont chers.
ReplyDeleteJoyeuses Pâques à tous.