A 7 h. du matin, par un beau Dimanche ensoleillé, nous nous retrouvons une trentaine de marcheurs. Nous voilà dans le car, heureux d’aller à la conquête de la forêt de "Kammouah"- Akkar (Liban Nord).
A Kammouah se trouvent des forêts rares de genévriers, de cèdres, de cyprès dominant à 1.600 mètres d'altitude. Ces forêts de chênes chevelus sont considérées parmi les plus belles forêts au monde vivant à cette altitude.
Nos chers voisins de la résidence de Val Fleuri, Elise et Toufic, se sont joints à nous pour cette aventure, ainsi que Françoise, ma chère nièce.
Le moral est au beau fixe. Nous passons Tripoli, en direction du Akkar, en route vers le Nord.
A Fneidik, le dernier village avant d’atteindre Kammouah, le car est paralysé par un trafic très dense. Nous prenons notre mal en patience et attendons de repartir. La route traverse le village et décrit une légère courbe en son centre.
Depuis son balcon au premier étage, au milieu de la courbe, un monsieur en pyjama rayé, essaie de canaliser le trafic avec force de mouvements désordonnés. Personne ne lui prête attention, personne ne lui obéit. Il disparaît, et revient quelques instants plus tard, sanglé dans son uniforme de gendarme.
Silence complet, nous sommes tous à l’écoute. Il ordonne à tous les propriétaires des magasins de rentrer leurs étalages. Tout le monde obéit, et le trafic reprend.
Au pied des cèdres, le car nous dépose près de l’unique maison. C'est un point de ralliement très connu par tous les marcheurs.
La marche commence. Nous grimpons entre les cèdres, silencieux, majestueux. Kammouah est une forêt accueillante, et nous sommes reçus à bras ouverts. Plus personne ne parle. Nous sommes tout ouïe et écoutons le murmure de ces arbres. Nous respirons leur parfum magique qui nous enivre. Nous entendons les cris des oiseaux qui s'enfuient à tire-d'aile. Nous nous croyions dans une grande cathédrale. Le soleil disparaissait parfois derrière les branches de ces cèdres centenaires. La forêt devenait sombre par moments. Nous étions comme des pèlerins dans ce lieu saint et mystérieux. Un lieu unique au monde, au parfum enivrant et au silence monastique. Nous aurions voulu que ces instants durent toujours, nous, assis au pied de ces arbres majestueux, et ne pensant plus à rien, dans ce silence mystique. Un véritable enchantement.
Tout d'un coup, un énorme BOUM. C'est un éclair, suivi d'un coup de tonnerre. Le grondement est impressionnant avec des échos qui se répercutent sur les montagnes alentour. Nous nous regardons effrayés. Des trombes d’eau se mettent à tomber sur nous en cascades. Il s'agit d' un gros orage.
Instinctivement nous nous regroupons et revenons sur nos pas.
Du jamais vu, c’est un vrai déluge. Le ciel s'obscurcit. Je crie au groupe de rester unis. Pas de panique. Nous connaissons ce genre de surprise désagréable. Nous sommes tous mouillés, nos bottes sont pleines d’eau. La descente se fait avec difficulté, avec la crainte permanente de glisser sur des feuilles mouillées.
J’entends alors une voix connue, au loin, vers le bas, c’est celle de Joseph S. qui me dit.
"Sérop, en arrivant sur le sentier au bas de la vallée, prenez tous sur votre gauche"
Joseph, un de nos marcheurs les plus chevronnés, connaît très bien la région. Aujourd’hui c’est lui, le responsable. C'était sa voix que j'entendais. Nous nous dirigeons vers cette voix. Je l’aperçois, haut perché, caché sous un rocher, presque nu, en slip, et dirigeant tout le groupe paniqué vers notre point de départ.
Joseph, je n’oublierai jamais cette scène, inimaginable. Toi presque nu, trempé. Nous l’étions aussi, mais toi sur ce rocher, en chef responsable, nous indiquant le chemin à suivre. Je garderai toujours ce jour en mémoire
Au loin, le chauffeur a eu la bonne idée, d’allumer les phares du car pour nous indiquer ainsi la route à suivre.
Nous étions sauvés. Une fois dans le car, je compte le nombre de marcheurs: Tous sont présents. Nous l’avions échappé belle. Nos bottes faisaient un drôle de bruit. Flac Flouc Flac...Nous étions trempés jusqu’aux os.
Malheureusement, nous n’avions aucun vêtement de rechange. Inévitablement, nous allions garder le lit le lendemain matin. Nous ne voulions même pas y penser.
Le retour commence, lorsque passant devant Fneidik, Françoise, assise près du chauffeur, dit à haute voix: «Les Galeries Lafayette en vue»
La pluie s’était arrêtée mais nous ne pouvions pas faire demi-tour. C’était trop risqué à cause du sol mouillé.
Un petit magasin avait exposé un ensemble de jeans de marque LEE, made in Syria. Nous nous ruons à l’intérieur.
Chacun commence à choisir soit une chemise, soit un jean, soit un tricot de corps ou encore un slip. Le salon d’essayage était mixte. Il se situait au fond du magasin, dans un coin. Un fil était tendu d'un mur à l'autre avec un drap servant de rideau. C’était la vraie foire, mais curieusement, nous nous sentions jeunes. Nous ne nous plaignions pas. Nous étions unis contre l’adversité de la nature. C’est cela le secret et le charme de la marche.
Paul, mon frère avait honte de se déshabiller. Je l’y ai obligé. Bien caché derrière le "drap-rideau", il commence à essayer les vêtements. Je jette un coup d’œil, et je le vois avec un slip de femme rose à la main. Nous entendons alors une dame qui lui dit:
"Paul, ne me regarde pas, je suis toute nue". En effet, elle était juste derrière lui.
Nous avions dévalisé le magasin et rendu un commerçant heureux. La jeunesse comme la vieillesse n’ont pas d'âge, tout est dans la tête. Ce petit magasin nous a beaucoup aidés.
Dans le car, il fallait user d’acrobatie pour pouvoir se changer et remettre les vêtements secs que nous venions d'acheter.
Que de scènes de fou rires, que de beaux souvenirs inoubliables! Jusqu’à présent, quand le hasard nous fait rencontrer quelqu’un ayant participé à cette mésaventure, immanquablement nous nous rappelons de Kammouah. Cela reste gravé dans notre cœur.
Arrivés sur l’autoroute, peu avant d'arriver à Tripoli, nous remarquons sur notre gauche, une pâtisserie arabe très réputée. Le chauffeur s'arrête juste devant l'entrée. Le seul inconvénient, c'est qu'en marchant à l'intérieur, nous laissions des traces sur le beau dallage à cause de nos chaussures toutes trempées. Nous n'osions pas avancer.
Cette photo a été prise juste devant le magasin.
De gauche à droite:
Jacques Naccache, Denise Dany, Paul Delifer, Andrée Naccache, Vivien Audi, Toufic Kahalé, Elise Kahalé, Sérop, Joseph Fayad, à genoux Mohammed Taha à gauche, et un marcheur dont j'ai oublié le nom.
Le lendemain matin, nous sommes réveillés par des coups de fil des marcheurs s'enquérant de notre état de santé. Toute la matinée ce seront des appels ininterrompus. Le plus curieux, c'est que personne n’a été malade. Tous les marcheurs étaient retournés à leur bureau, racontant à leurs amis leur mésaventure de la veille. Ils voulaient déjà connaître le programme de la prochaine sortie.
Le dimanche suivant, la sortie a eu lieu aux cèdres de Becharré. Sans problèmes. Nous étions à peu de choses près, les mêmes participants
Au retour, nous garderons en souvenir, de la glace de chez Salem, offerte par Toufic à tout le groupe.
Comme toujours, les aventures de Sérop sont palpitantes. Quelle forêt merveilleuse. Merci de nous faire partager ces moments inoubliables et pleins de joie de vivre.
ReplyDeleteMerci Jocelyne
ReplyDeleteTu m'encourages à continuer mes aventures et j'aime bien les partager avec la famille