Dans mon cours de pilotage, j’avais un élève, Alexandre Chouéri, qui après avoir obtenu sa licence de pilote, effectuait des baptêmes de vol, ou encore des aller-retour Beyrouth/Chypre, suivant la demande.
Pour leur cadeau de Noël de 1970, Evelyne et moi, avons pensé offrir un de ces vols sur Chypre à Alain et Laurent
Alexandre Chouéri est d’accord pour jouer le jeu et se propose de les emmener sur son "Cessna".
Nous voulions faire croire aux enfants qu'ils iraient sur le vol régulier d’une compagnie aérienne normale. Pour rendre la chose plus plausible, j'avais même réussi à me procurer deux billets de vol périmés. aux réservations de la MEA.
J’ai moi même écrit le nom des enfants sur les billets, avec le nom de la compagnie, le numéro du vol, la date du départ, la destination, etc...
Avec Alexandre, nous convenons de fixer le jour du départ au jeudi 24 décembre, à 9:00
La veille du départ, j’annonce aux deux garçons notre intention de partir, et leur demande de préparer tout le nécessaire pour un vol: passeports, cartes d’identité, pyjamas, linge de rechange, et je leur remets les billets.
Je vous laisse imaginer leur joie.
Je crois qu’ils n’en ont pas dormi de la nuit.
Jocelyne se trouvait alors à Paris, pour ses études de flûte.
Arrivés à l’aéroport le lendemain à 9:00, Alexandre en tenue de pilote, avec sa casquette, demande très sérieusement à vérifier les billets, les cartes d’identité, et les passeports.
Rendez vous est pris, porte 6, au pied de l’avion, un Cessna, Papa Echo
Nous passons la douane et la sûreté. Ces deux organismes étaient dans la confidence et jouaient le jeu avec nous. Alexandre les connaissait bien. Tout était bien organisé.
Alexandre nous attendait au pied de Cessna de 4 places. Nous montons. Alain se met à côté du pilote, Laurent est derrière Alain, et moi, à côté de lui. Nous décollons. Le temps est magnifique, ciel bleu, pas un nuage, la mer superbe. Une très belle journée qui s'annonce.
A Nicosie, nous passons la douane et la sûreté sans aucun problème Nous prenons un taxi en direction de l'Hôtel Hilton, où deux chambres étaient réservées, dont une pour Alexandre.
A midi, nous quittons l’hôtel pour déjeuner dans un restaurant chypriote, et continuons à visiter la vieille ville de Nicosie. Nous pensons à maman, et lui achetons un foulard en souvenir.
Le soir, dîner en ville et visite de la ville de nuit. Le lendemain, avant de quitter l’Hôtel Hilton, nous nous régalons avec un copieux petit déjeuner, et reprenons un taxi pour l'aéroport.
Une fois de plus, les formalités se passent bien.
Nous sommes installés dans le Cessna, à 9:00, à destination de Beyrouth, heureux.
Les enfants ne sont pas prêts d’oublier ce Noël inoubliable. A vrai dire, ils méritaient bien ce cadeau.
Je me souviens…
Une après midi, je suis seul à la librairie. Je vois entrer une religieuse des Sœurs de St Vincent de Paul, dont la maison se trouve non loin de la librairie.
Nous nous étions entendus avec les Religieuses du fait qu’elles pouvaient se procurer toutes les fournitures nécessaires de bureau dont elles avaient besoin.
C’était une manière d’aider ces braves sœurs.
Je n’avais jamais eu l’occasion de recevoir cette jeune religieuse, d’une beauté rare qui m’a aussitôt frappé d’étonnement. J’étais ébranlé de voir une telle religieuse, qui d’habitude, ont une spécialité bien reconnue de prestance.
Devant cette apparition, j’étais très touché. J’ai même failli oublier que j’étais marié.
Elle me demande quelques articles, veut régler. Je refuse en lui disant qu’elle est nouvelle, et qu’elle n’est pas au courant de notre accord avec la Maison Mère.
J’essayais de la retenir, en lui demandant la raison de notre première rencontre.
Elle répond, d’une voix angélique:
"Oui, je suis arrivée hier de Téhéran"
Pourtant, j’avais entendu dire que tous les ordres religieux étrangers ont été chassés d’Iran.
"Oui, répond l’oiseau, quand l'Imam Khomeini a chassé le chah d'Iran, nous étions obligés de quitter la léproserie. Le problème c'est qu' aucune organisation iranienne n’a voulu prendre la relève. Devant cette réaction, l'Imam Khomeini a été obligé d'éditer un nouveau firman nous autorisant à rester en Iran, pour continuer à prendre soin des lépreux iraniens."
Je priais pour qu’aucun client ne vienne nous déranger et couper cette apparition angélique.
"Dans deux jours, je rentre chez moi."
J’ai voulu la garder un peu plus, profiter de cette beauté magique, je lui demande alors, dans quelle partie de la France elle compte s’installer.
"Chez moi, Monsieur, je retourne, à la léproserie à Téhéran."
Je suis resté muet. Abasourdi. Plus rien n’existait
Ce n’était pas possible.
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