Un samedi de 1956, Air Liban est chargé d’emmener à New Delhi ( Inde ), un groupe de professeurs français, avec leurs femmes, arrivant de Paris, sur un constellation d’Air France.
Ces professeurs ( très sympas) sont invités par le Président Nehru (le président de l’Inde ) à un congrès qui aura lieu le lendemain dimanche, à New Delhi. Le retour aura lieu le mardi de New Delhi.
Vol sans problème, Tout va bien. A l’approche des côtes Pakistanaises, j’appelle Karachi Airport pour l'informer de notre position, notre destination étant New Delhi, Indian Territory.
Les autorités pakistanaises nous demandent d'atterrir immédiatement à Karachi. Elles n'autorisent à aucun avion étranger de survoler leur territoire sans autorisation préalable.
Nous atterrissons, bien obligés, et demandons des éclaircissements.
Nous sommes fautifs de ne pas avoir demandé le permis de vol, 24 heures avant le survol du Pakistan. C’est le travail exclusif des Opérations d’Air Liban. S'agit-il d'un oubli, d'un retard de transmission?
Les autorités sanitaires Pakistanaises reçoivent les passagers ( en transit ) et les traitent comme des pestiférés, prétendant que l’origine du départ initial de l’avion étant Paris et qu’internationalement Cette Ville Française, nommée Paris, sur la liste noire, est reconnue pour ses maladies telles que, la Malaria, la Fièvre Jaune, le Sida etc. sévissant dans ce pays. ( dommage, il n'y avait pas encore le Corona ),obligeant le Pakistan à garder les passagers en quarantaine.
Nous sommes très étonnés que les passagers soient condamnés à la quarantaine. Un début de bagarre est évité, quand un des gardes de la sûreté, tenant la main d’une dame, veut la conduire de force, dans le pavillon des femmes. Je vous laisse imaginer le délire du mari.
Nous, en temps qu'équipages, venant de Beyrouth, sommes priés de rester au "Beach Luxury Hôtel", au bord de l’océan Indien, en attendant notre libération. Beyrouth est informé et veut connaître la raison de notre arrêt. Dans notre métier, cette situation s’appelle simplement, "LE BORDEL."
Face à cette situation incontrôlable, nous appelons AU SECOURS, les deux ambassadeurs libanais et français. C’était inutile de les déranger.
L’ambassadeur Libanais Amine el Tayeb, me reconnait, ayant été ensemble en classe de philo, en 1942, au collège des Pères Jésuites, à Beyrouth, au Liban. Il invite tout l’équipage, le lendemain, dimanche, pour un déjeuner, chez lui, à la maison. ( sous sa responsabilité ).
Le lendemain, dimanche matin, après l'English Breakfast, l’hôtesse, Jeannette Ghostine, veut se renseigner auprès du concierge, des horaires des messes à la cathédrale de Karachi. Je suis très étonné de l’existence de chrétiens au Pakistan,
Le concierge est très étonné. "Comment vous, musulmans, allez à l'Église? ce n’est pas possible, NON, vous êtes des musulmans, I have your lebanese passports, so you are moslems."
Discussion inutile, le concierge est même fâché de notre insistance, il nous tourne, presque le dos.
Jeannette, à côté de moi me souffle, "comment le prouver ?" Je réagis en disant "Half of Lebanese people are Christian ". Il ne me croit pas. Alors instantanément, sans réfléchir, je dis "I am a christian," en accompagnant ma phrase du signe de la croix.
Le concierge devient tout blanc, il regarde à droite, à gauche, dans le grand hall pour s’assurer que personne ne le voit. Il fait alors le signe de la croix, lui aussi, et me dit avec un petit sourire, "I am a Christian too".
Je suis bouleversé. Il me dit alors: "My brother, is a Christian too, he will drive you to the Church, be here at 5:00 P. M.
Impossible de décrire notre étonnement, je ne savais pas que le Pakistan, pays à majorité musulmane de 217 millions permettait aux chrétiens d’avoir leur liberté de culte.
Je demande à mon ami Google, le pourcentage de chrétiens au Pakistan par rapport aux musulmans
Pakistanais, les chrétiens représentent 1,6 % me répond Google. C’est minime.
Le dimanche, à midi, avec le taxi du frère du concierge, le pilote Unvoas, le co pilote Jerdi, et moi, le navigateur, et Jeannette Ghostine, hôtesse, nous, nous rendons tous les quatre chez l’ambassadeur, comme prévu. J’achète un bouquet de fleurs, Madame Hajj nous reçoit, et nous remercie, très gentiment.
L’ambassade du Liban se trouve dans un quartier chic de Karachi. Réception très cool, le pilote est très étonné de cet accueil. Amine et sa femme, sonttrès heureux de parler de leur cher Liban, et surtout pour Amine, de nos souvenirs du collège. Il me rappelle la discipline des curés, et leur compétence.
Amine se rappelle surtout des cours intéressants de Philo du Père Pélissier, de qui il garde un très bon souvenir.
Je me garde bien de faire allusion à l’ambassadeur, de notre entrevue du matin, avec le concierge.
La cuisine libano/pakistanaise, préparée par une cuisinière locale est excellente Nous garderons un très bon souvenir de ce déjeuner. L’ambassadeur ne peut intervenir pour débloquer la situation.
A 17:00 comme prévu, Jeannette et moi, assistons à la messe dans la grande Cathédrale Notre Dame, immense, pleine de monde. Il n'y avait plus une seule place assise.
Je me suis retrouvé, comme dans n’importe quelle église de chez nous. Les fidèles à genoux, pieux et priant en silence. Ce qui m’a frappé le plus, la tradition familiale qui existe, ici aussi, de voir des nouveaux mariés, avec leur bébé, restés à l’arrière, près de la porte d’entrée, s’occupant du bébé en train de pleurer. Quitter
de suite l’église, pour ne pas déranger les fidèles.
Le plus frappant, c’est de voir, ces jeunes et ces vieux, se mettant à genoux, avec ferveur et conviction, participant aux cantiques. J’avais eu la même réaction au Tchad, lors de mon séjour, l’an dernier.
Au retour de la messe, l’agent d’Air France est présent à l’hôtel avec le pilote Unvoas. Ils nous informent que le départ pour New Delhi a été décidé pour ce soir. Les passagers seront à l’aéroport à 20,00 heures, afin de permettre aux professeurs d’assister aux séances du Congrès à New Delhi, le lundi matin.
Ils auront ainsi raté seulement la séance d’inauguration, présidée par le président Nehru.
Tout était rentré dans l’ordre, les professeurs et leurs femmes étaient libérés. Après réception d’un télex d'Orly, d’une soi disant copie, pleine de tampons, oubliée, par l’équipage, lors de leur départ d' Orly, en assurant que l’avion d’Air France avait été bien aseptisé avant son départ pour Beyrouth, ainsi que les passagers, et l’équipage. Le bureau sanitaire présente ses excuses pour cet impardonnable oubli.
La vérité est qu'il n’existe aucun contrôle sanitaire au départ d'Orly.
Paris, ville sur la liste noire, a bien réussi à tromper ces pakistanais ignares de l’aéroport.
Durant le vol, le Commandant Unvoas ( chef pilote ) nous conseille de profiter du temps libre le lundi, et nous confie qu'il a l’intention de visiter le Taj Mahal à Agra. Il nous demande qui veut bien le suivre. Nous ne pouvions pas ne pas visiter le Taj Mahal, une des 7 merveilles du monde. Nous étions tous d’accord. Il prenait la responsabilité de tout retard éventuel.
Dès notre arrivée à l’hôtel "Taj Palace Hôtel" ,à New Delhi, réservé par Air France, il se renseigne sur les possibilités de location d’une voiture pour 5 personnes, pour la journée de lundi, afin de visiter le Taj Mahal à Agra.
Lundi matin, nous sommes tous prêts à 8:00, après avoir pris nos "english breakfasts". Nous quittons l'hôtel à 9:00, nous quatre dans une van spacieuse, avec un chauffeur parlant à moitié le français, pour le Taj Mahal.
J’étais assis près du chauffeur et j’étais mort de frayeur, car la conduite en Inde, est à gauche, et je ne le savais pas.
La merveille des merveilles: Impossible de vous décrire cette beauté du Taj Mahal. Il faut le visiter pour comprendre. Le risque que nous avons pris, en valait la chandelle.
De retour le soir, nous sommes bien fatigués, mais heureux. Le lendemain, nous avions temps libre jusqu’à midi. J’en ai profité pour acheter un châle fleuri, au centre de New Delhi. Un énorme centre, où on pouvait trouver tout ce que produisait le pays.
Jusqu’à ce jour, Evelyne porte ce châle qui me rappelle le Taj Mahal.
A 17:00 nous quittions New Delhi, à destination de Beyrouth, avec nos passagers français à bord, en attendant le prochain charter.
Tu nous donnes envie de voyager et de découvrir toutes ces merveilles !
ReplyDelete(J'ignorais que je Pakistan était plus peuplé que le Brésil...).
Cher Serop! Très tôt j'ÉCOUTAIS ton dernier conte! Les contes de Serop !Tu es un grand conteur ! Déjà la magie des mots nous tient en haleine de la 1ère à la dernière ligne ! Mais , mon cher Cousin , c'est ta voix , TON ACCENT , TES INTONATIONS que j'entends tout au long des lignes et , à la fin je te dis : ENCORE ! ENCORE !
ReplyDeleteS'il te plaît, enregistre toi racontant tes mille et une aventures ! Quel bonheur , alors , de t'entendre en te lisant .
Vous tous INSISTER pour que nous ecoutions Serop ! Quelle belle dimension à ces Contes!
C'est cela que je VOTE haut la main! N'est ce pas tout le monde ?
C'est un véritable roman d'aventures dont nous découvrons un épisode chaque Mercredi.
ReplyDeleteA peine avons-nous lu un chapitre que nous attendons déjà le suivant.
Nous sommes transportés dans un autre monde et ça nous fait oublier pour un moment les réalités de notre quotidien.
Merci cher Navigateur
Cher Serop,
ReplyDeleteJe profite de votre "enquête de satisfaction" pour vous dire que nous avons un grand plaisir à vous lire chaque semaine ! Vos récits sont très beaux, très émouvant et ont toujours un sens profond plus ou moins caché qui toujours nous élève...Et nous vous remercions de tout cœur pour tout cela !
A défaut d'avoir le plaisir de vous voir avec Evelyne, nous sommes très heureux de vous retrouver à travers votre blog tous les mercredis (et je me permets d'approuver la suggestion de Françoise pour que nous ayons aussi votre voix...!)
Je vous embrasse tous les deux très affectueusement.
Henriette